*** A propos de Taha Bouhafs., Houria Bouteldja pour les nuls
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*** A propos de Taha Bouhafs.

Post publié le 10 mai 2022.

C'est l'hallali. Les charognards espéraient ce moment depuis quelques jours et il est arrivé. Taha Bouhafs renonce à son investiture NUPES, las, dit-il de, tous les jours que Dieu fait, encaisser "calomnies", "insultes" ou "menaces de mort".

A aucun moment il ne met en cause la FI mais déjà le tribunal des réseaux sociaux a rendu son verdict. La FI l'aurait lâché. Au moment où j'écris, on n'en sait pas plus mais les Torquemada du net ont sorti leur sabre et déjà les têtes tombent alors que l'urgence et la gravité des choses nous commanderaient de rester prudents, tout simplement pour ne pas être esclaves du temps médiatique et pour prendre le temps de le réflexivité. A ce stade, le moins que l'on puisse faire c'est attendre ce que l'intéressé a à en dire et attendre les explications de la FI.

Mais il est des plaisirs et des jouissances qu'on ne peut différer. Aussi, pour eux - les charognards - ce serait sacrilège de laisser passer les occasions divines quand elles se présentent de manière aussi inopinée. C'est le cas de :

- Certains courants d'une extrême gauche dogmatique trop heureuse de pouvoir interpréter les faits comme racistes pour à postériori légitimer leurs analyses bidon et leur défaitisme du premier tour.

- Certains militants indigènes pressés de laver leur honneur après avoir fait campagne contre l'UP (pour des raisons inavouables et bassement politiciennes) alors que des dizaines de milliers d'indigènes dont ils prétendent être les porte-voix ont contredit leur "radicalité" en votant UP.

- Mais aussi - Ô ironie! - de Clavreul, Enthoven, LCI, Le Monde ... Macron, Le Pen....Il est des convergences savoureuses n'est-ce pas ?

Plus problématique pour moi, d'un point de vue militant et indigène, le concert de pleurs et d'indignations sans le moindre recul analytique et sans vison stratégique d'ensemble. Car bon sang, de quel bois sommes-nous fait ?

- Si l'on admet comme c'est mon cas que la FI fait partie du champ politique blanc, comment peut-on tomber de son lit à chaque "trahison" si tant est que celle-ci est avérée ?

- Comment une simple élection dans laquelle, certes, le vote indigène a été déterminant, peut-elle nous transformer en mendiants/créditeurs/chouineurs auprès de la FI à tel point qu'ils sont nombreux ces indigènes à s'estimer éligibles pour des postes de députés au motif que la banlieue à voté - comme si cela devait se traduire immédiatement par des privilèges matériels pour les plus dotés d'entre nous - alors que pour certains ils font à peine leurs premiers pas dans le militantisme ?

- Comment s'imaginer que la FI allait se transformer comme ça en espèce de fée au pouvoir magique distribuant des sièges à qui veut comme si elle était libre de faire ce qu'elle voulait alors qu'elle est en partie pieds et poings liés avec le PS, Les Verts et le PC et que même les prolos blancs sont peu représentés.

Qu'on se comprenne bien. Des lésés, il y en a plein, à commencer par les plus méritants tels Azzedine Taibi qui a tout mon soutien en plus de mon respect mais qui est membre du PC et donc pas dans l'autonomie indigène. Des erreurs et des fautes de la FI, beaucoup, notamment certains parachutages dont on aurait pu se passer. Tout comme peut-être (mais c'est à Taha de le dire) un manque de soutien de la part des ténors de la FI. Mais globalement, je ne connais aucune législatives où les candidats indigènes ont été aussi nombreux. Une fois de plus, le mérite revient à tous les habitants des QP qui ont participé au succès de l'UP. Celle-ci, dans la mesure du possible, doit être à la hauteur de cette confiance. C'est une lourde responsabilité qu'elle paiera chère si elle trahi la confiance des classes les plus précaires. Quant à nous, notre responsabilité elle est de garder la tête froide et de garder une vision globale : c'est à dire regarder la lune plutôt que le doigt.

1/ Quels que soient les erreurs ou les compromis de la FI dans le cadre des accords qui l'obligent, nous devons reconnaître que nous avons franchi une étape qualitative dans l'antiracisme en remportant des batailles (pas la guerre!) contre l'islamophobie. C'est ici un acquis collectif et non individuel. A ce titre, que toutes les ambitions indigènes individuelles ne soient pas rétribuées m'importe peu.

2/ NOUS NE POUVONS COMPTER QUE SUR NOUS-MEMES. La FI est un appui mais l'essentiel est dans l'autonomie. Ceux qui le savent ne pleurent pas. Ils mesurent le chemin parcouru et se projettent vers l'avenir en se demandant quelle est la prochaine étape stratégique pour consolider les acquis. Rien d'autre.

3/ Il ne faut pas renoncer à faire pression sur la NUPES pour qu'un maximum de candidats sérieux soient investis mais pas au point de faire des casus belli inutiles quand tout candidat de la NUPES est sensé défendre le programme.

Pour ma part, j'ai toujours insisté pour défendre un soutien critique fondée sur une autonomie de jugement à défaut de véritable autonomie politique qu'il est nécessaire de (re)construire. C'est la raison pour laquelle, ni je pleure, ni je m'indigne. L'émancipation, ça se gagne dans la lutte.

Dernière chose. Taha Bouhafs s'était ému il y a quelques années d'un de mes posts où je disais en gros : "en voilà un qui fait tout pour nous esquiver". En effet, je voyais bien qu'il craignait de se bruler les ailes à notre contact vu qu'il voyait plus d'intérêt à être à la FI qu'avec nous. Qualité que Mermet avait su estimer à sa juste valeur puisqu'il l'a saluée comme il se devait. Ce que je voulais dire et que Bouhafs n'a pas compris, c'est que fuir l'antiracisme décolonial c'est fuir les analyses qui permettent justement de construire une carapace dans ce monde où l'indigène est et restera méprisé tant qu'il ne construira pas sa maison. Il finit toujours par se brûler les ailes - c'est ce qui arrive à Bouhafs et cela m'attriste profondément pour lui - car comme nous l'ont appris nos ancêtres : "arbi, Arbi wat hatta louken en colonel Bendaoued". C'est justement parce qu'on a bien compris l'adage qu'on ne peut pas faire confiance à la FI (non pas pour des questions d'insincérité mais de structures et de rapports de force). Mais c'est aussi parce que nous sommes des militants lucides et cohérents que nous devons continuer de la soutenir malgré tout pour les efforts politiques qu'elle fait en dépit des vents défavorables et contre ceux de nos pires ennemis qui n'attendent que la dislocation de la coalition. Souvenons-nous que la présidentielles à fait apparaitre un électorat de 40 % en faveur de l'extrême droite et que cela n'est pas une mince affaire et que les plus islamophobes de la vie politique française sont sûrement ceux (avec les idiots utiles) qui se réjouissent le plus de ce spectacle. S'ils se repaissent c'est qu'ils se savent être les bénéficiaires de notre manque de sang-froid. Perso, je sais ce que j'ai à faire. A bon entendeur.

Second post publié le 11 mai 2022 :

*** Accusations d'agressions sexuelles à l'encontre de Taha Bouhafs.

Donc :

1/ on avait raison de ne pas s'enflammer

2/ les explications ont été données par les principaux concernés à Médiapart et BFM.

3/ je trouve les réactions de Bouhafs sobres et celles de la FI honnêtes malgré les ambiguïtés des premiers jours. Sa suspension est normale et régulière compte-tenu de la situation.

Maintenant, que dire devant la machine à polémiques ?

1/ Ce n'est pas parce qu'on a soutenu Bouhafs contre le racisme qu'il faut regretter de l'avoir fait sous prétexte qu'il est accusé d'agressions sexuelles. Ceux qui regrettent leur soutien sont des lâches.

2/ Ce n'est pas parce qu'il nie les faits qu'il est innocent. La parole de l'accusatrice doit être prise au sérieux.

3/ Ce n'est pas parce qu'il est accusé qu'il est coupable. Il doit bénéficier de la présomption d'innocence comme tout le monde.

(Quel monde de merde).

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